Maroc : pourquoi le Polisario bloque El Guerguerate

Alors que le Conseil de sécurité de l’ONU doit statuer le 28 octobre sur la reconduite de la Minurso, le Front Polisario cherche à fermer le point de passage avec la Mauritanie.

Mercredi 21 octobre. C’est l’alerte rouge à El Guerguarate, ce no man’s land séparant le Maroc et la Mauritanie. Une cinquantaine de membres du Front Polisario débarquent en force, armes en bandoulière, et s’attellent à ériger un barrage de fortune : des pierres et des pneus sont disposés de manière à couper la route reliant les deux pays. Depuis fin septembre, le Polisario appelle ses militants à des manifestations dans la zone. Présentes sur place, les forces de la Minurso cherchent, elles, à convaincre les hommes du Polisario de renoncer à ces actions qui ont pour effet d’obstruer la circulation civile et commerciale sur la frontière. En vain.

Principale cause de ces nouvelles tensions entre le Maroc et le Polisario : la série d’ouvertures de consulats africains dans ce que le royaume considère comme ses provinces du Sud. Le 23 octobre, le Burkina Faso, la Guinée-Bissau et la Guinée-équatoriale ont inauguré leur consulat à Dakhla. Depuis un an, les Comores (décembre 2019), le Gabon, Sao Tomé-et-Principe, la République centrafricaine (janvier 2020), ainsi que la Côte d’Ivoire (février 2020), Djibouti, le Burundi, la Guinée et le Libéria (mars 2020) ont également ouvert des représentations diplomatiques dans la région.

Cette reconnaissance de fait de la souveraineté marocaine sur le Sahara par ces pays africains inquiète le Polisario, qui brandit à nouveau la menace du retour aux armes via son agence de presse SPS : « Il s’agit d’un acte hostile visant à saper la souveraineté de la RASD [République arabe sahraouie démocratique] (…) et une grave violation du statut juridique international du Sahara occidental. » Le communiqué du Polisario considère même les gouvernements de ces pays comme ayant « vendu leur âme au diable, en échange de quelques promesses vides alors que leurs peuples souffrent de pauvreté et de privation. »

Au siège du Conseil de sécurité de l’ONU, la réaction ne se fait pas attendre. Le jour même, par la voix de son porte-parole adjoint, le Secrétaire général des Nations unies a « rappelé que la circulation civile et commerciale régulière ne doit pas être entravée et qu’aucune mesure ne doit être prise qui pourrait constituer un changement du statu quo dans la zone tampon », a insisté Stéphane Dujarric.

Appel au calme

Ce dernier fait savoir que la mission onusienne a mobilisé de nouveaux éléments pour tenter de désamorcer cette nouvelle crise. « Nous exhortons toutes les parties concernées à faire preuve de retenue et à prendre toutes les mesures nécessaires pour apaiser les tensions », a ajouté le porte-parole d’Antonio Guterres.

Quant au personnel diplomatique marocain, il estime que cette action du Polisario constitue « un acte désespéré pour essayer d’influer sur la nouvelle résolution du Conseil de sécurité attendue cette semaine, sachant que le rapport préalable du Secrétaire général [de l’ONU] est largement en faveur du Maroc. » Le rapport du 2 octobre du secrétaire général de l’ONU pointait notamment les « nombreuses violations » du Polisario. Le président de la RASD Brahim Ghali avait réagi en critiquant à son tour la Minurso, selon lui « spectateur passif devant les actions annexionnistes du Maroc ».

LES AUTORITÉS MAROCAINES ONT RÉAGI AVEC FERMETÉ À CETTE NOUVELLE PROVOCATION DU FRONT POLISARIO

De leur côté, les autorités du royaume ont réagi avec fermeté face à ce qu’elles considèrent comme une nouvelle provocation du Front Polisario. « Point de processus politique avec les gangs. Point de processus politique avec les brigands », a martelé le ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita à l’évocation des éléments du Front Polisario stationnés à Guerguarate. Et d’ajouter : « Point de processus politique avec la partie qui a perdu toute crédibilité qui travaille en tant que groupe armé et gang. Elle ne peut-être l’interlocutrice du Maroc et ne peut-être une partie dans tout processus politique. » Une manière d’indiquer que les rounds de négociation de Genève, interrompus depuis mars 2019 et la démission de l’ancien envoyé personnel du SG de l’ONU, Horst Köhler, ne sont pas près de reprendre…

Pendant ce temps, le Maroc continue à renforcer ses liens diplomatiques et à consolider sa légitimité au Sahara. L’ouverture d’un nouveau consulat général de la Zambie est ainsi prévue ce 27 octobre, cette fois-ci à Laâyoune, chef-lieu du Sahara.

Par Fahd Iraqi / JA

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