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Ils fuient la lumière comme la peste. Discrets mais redoutablement efficaces, difficiles de se passer des services de ces hommes de réseau et de l’ombre que sont le Malien Ahmada Ag Bibi, le Nigérien Mohamed Akotey et le Mauritanien Limam Moustapha Chafi dans les dossiers extrêmement complexes de libération d’otages dans le Sahel. Voici un petit aperçu de leurs profils et de leurs états de service :
Ahmada Ag Bibi
C’est bien lui le négociateur en chef qui a obtenu la libération de Soumaila Cissé comme annoncé en exclusivité sur cette page. Membre de la puissante tribu des Ifhogas, Ag Bibi est un ancien cadre des rébellions touarègues des années 90. Quand son ami Iyad Ag Gahli lance le mouvement Ansar Eddine qui va occuper un moment une partie du Nord Mali, il est à ses côtés. Par la suite, il intègre le Haut Conseil pour l‘Unité de l’Azawad. L’ancien sécessionniste, qui a un sens politique très aigu, n’hésite pourtant pas à se faire élire député sur la liste du RPM, quand le Président Ibrahim Boubacar Kéita accède au pouvoir en 2013. Ses réseaux tissés au niveau de la nébuleuse djihadiste et sa proximité avec Iyad Ag Ghali et les milieux sécuritaires algériens, lui ont permis d’obtenir la libération de Soumaïla Cissé et de l’otage française Sophie Pétronin. Auparavant, Ag Bibi avait déjà fait ses preuves en étant l’un des négociateurs qui avaient obtenu en 2011 la libération de trois des sept otages d’Arlit.
Mohamed Akotey
Tout comme Ag Bibi, Mohamed Akotey est un touareg de la tribu des Ifoghas mais il est de nationalité nigérienne. Tout comme certains de ses parents maliens touaregs, Akotey a un passé de rebelle. Etudiant en France, il est obligé de rentrer au Niger pour prendre la succession de son oncle Mano Dayak, emblématique chef rebelle touarègue, co-fondateurs du mythique rallye «Paris-Dakar », décédé dans un accident d’avion en 1995. Pragmatique, il signe les accords de paix de Niamey et entame une nouvelle carrière. Il sera même nommé ministre de l’Environnement par le Président Tandja avant de se lancer dans les affaires. Il devient PCA d’Imouraren SA, une société nigérienne détenue à 58 % par le groupe nucléaire Areva. Mais Akotey sort de l’ombre malgré lui, en octobre 2013, en obtenant la libération spectaculaire du reste des otages français enlevés à Arlit et détenus par le redoutable chef islamiste Abou Zeid. C’est à lui aussi que l’otage franco-serbe Serge Lazarevic doit la liberté. Des opérations menées de main de maître qui ont fini par assoir sa réputation dans le Sahel et dans les milieux sécuritaires occidentaux.
Limam Moustapha Chafi
C’est sans doute l’un des hommes les plus «réseautés » en Afrique. Longtemps basé à Ouagadougou, le Mauritanien Limam Moustapha Chafi, fils d’une très grande famille maure de la tribu des Tajakant, a grandi au Niger où son père était commerçant. Ayant vadrouillé un peu partout avant de se poser à Ougadougou, il a longtemps été le stratège de l’ombre du président Blaise Compaoré qu’il a connu jeune aux côtés du capitaine Thomas Sankara. Conseiller très spécial de l’ancien homme fort du Burkina Faso, il a été son missi dominici avec le général Gilbert Diendéré et l’ancien ministre des Affaires étrangères Djibrill Bassolé, dans bien des dossiers qui n’ont pas encore livré tous leurs secrets. Il n’y a pas une capitale ouest-africaine où Chafi n’a pas ses entrées. Réputé pieux, c’est est un polyglotte qui connait très bien le Sénégal. Ses talents de négociateur et son impressionnant carnet d’adresse feront merveille dans le cadre de la libération d’otages espagnols ainsi que celle d’un otage canadien, après de dures négociations avec le chef djihadiste Mokhtar Belmokhtar. L’homme était redouté par l’ancien Président Ould Abdel Aziz qui le soupçonnait de vouloir déstabiliser son régime. Très proche de Macky Sall tout comme l’homme d’affaires et milliardaire Mouhamed Ould Bouamatou, autre ennemi juré d’Ould Abdel Aziz, Chafi n’a pu rentrer à Nouakchott qu’à l’arrivée de Mouhamed Ould Ghazouani au pouvoir. Il s’est aussi beaucoup rapproché de l’émir du Qatar dont il est devenu l’un des conseillers les plus écoutés. Il était ainsi au cœur de la dernière visite du Président bissau-guinéen Umaro Sissoco Embalo à Doha.
Barka Ba, Journaliste (Sénégal)