Quel avenir de l’UPR après les élections ?

On rapporte qu’au moment de la délibération des résultats du référendum constitutionnel, le Président Abdel Aziz n’a cessé de répéter à ses ministres, « les choses n’ont pas été suffisamment expliquées au peuple ». La débâcle référendaire se profilait inéluctablement sous ses yeux. Il a certes dissolu le Sénat (85%), modifié le drapeau national (85,6%), et réécrit l’hymne national, il n’en demeure pas moins qu’au soir du 5 août, Abdel Aziz a essuyé un échec cuisant. Même si la victoire a été annoncée et que le oui a rapporté plus de 53,75%, l’abstentionnisme avait atteint des proportions inattendues. À Nouakchott, on a enregistré un taux supérieur à 35%. L’opposition avait appelé à boycotter le référendum. De ce fait, les populations, excédées par les politiques gouvernementales inefficaces, avaient tout bonnement choisi de ne pas se déplacer dans les bureaux de vote. Dans la même soirée, au fil de l’annonce des résultats, le visage du président se renfermait, il quittera finalement le palais des congrès, visiblement remonté. Ce soir-là, des proches de l’homme ont vu un homme furieux contre les dirigeants de l’Union pour la République (UPR), ses ministres et ses inconditionnels soutiens.

Ould Hademine, le poseur de mines

Des observateurs supposent que ce second échec du chef d’État, subvenu après celui du boycott de l’opposition radicale des présidentielles de 2014, est consécutif aux luttes intestines qui traversent son parti. Plusieurs factions dirigées par des ministres s’y opposent. Qualifié de poseur de mines, le Premier ministre, Yahya Ould Hademine a planté un état d’esprit antagoniste au sein du parti. La preuve, après bientôt trois ans de guéguerre clanique, son malentendu avec Isselkou Ould Izidib, qui frisait l’animosité, a fini par écarter ce dernier des Affaires étrangères. La Ministre de la Fonction publique, Ba Coumba, mène quasiment sa campagne hors des directives du parti. Entre le Premier Ministre et Naha mint Moukhnass, le courant ne passe plus depuis plus de deux ans. On avance qu’Abdel Aziz n’a pas réussi à mettre fin à leur bras de fer. Seuls les protégés du Président, comme le jeune ministre du Pétrole ou encore les poulains du PM, comme Dia Mocktar Malal de la Justice sont à l’abri de l’arrogance de Yahya. A cela il faut ajouter les protestations tribalistes, claniques et régionales liées aux choix jugés non représentatifs de bases locales au niveau des régions.

Aziz et les tournées « sauve qui peut »

Constatant que le parti est miné de l’intérieur, un ancien colonel, le maire de Zouerate Cheikh Ould Baya, pourtant extérieur du bureau politique de l’UPR, a proposé au président de la république de revigorer les instances du parti. Aziz était quasiment convaincu que sans la remobilisation des troupes, il subirait un autre échec aux législatives. C’est ainsi que son confident, l’ex-colonel Ould Baya, est entré en jeu. Ce proche d’Aziz, dissuadé par les militaires à créer son propre parti, a été obligé de solliciter par défaut le ministre de la Défense, Diallo Mamadou Bathia pour remettre les instances du parti sur les rails. L’objectif était de calmer les ardeurs protestataires des sections de base dont les plus hostiles sont infiltrées par les adversaires du raïs. L’objectif est de prémunir le parti des vagues de transhumance vers d’autres partis. L’ingénieuse idée de campagne de réimplantation n’a pas seulement donné des résultats positifs. Le fossé s’est creusé entre les factions des ministres. L’opinion nationale découvrira que l’objectif n’était pas seulement celui de redynamiser les instances du parti : Aziz voulait jauger la popularité de ses propres factions. A défaut, ses bataillons ont fait du rechauffé en surfant sur le troisième mandat. Tout compte fait anticonstitutionnel.

Par ailleurs, avec les investitures électorales, émaillées de cooptages tribalistes et claniques, plusieurs ténors de l’UPR se sont présentés sous d’autres bannières. Ce qui constitue un sérieux frein à l’obtention de la majorité parlementaire, l’unique porte d’entrée du troisième mandat.

Comprenant la gravité de la situation, Aziz était obligé de se relancer dans la campagne en brandissant la menace contre tous ceux qui useront du vote sanction contre les listes électorales de l’UPR. Les injonctions électorales du président témoignent de la déliquescence du parti au pouvoir. Il s’est rendu compte que ni Ould Baya, ni Ould Maham, ni encore moins Diallo Mamadou Mbathia n’ont d’emprise sur les bases très remontées par la politique de l’exclusion, les discriminations et le mensonge du gouvernement de Yahya Ould Hademine. Le chef de l’Etat est d’ores et déjà saisi d’une grande inquiétude, ne sachant pas ce que lui réservent les urnes.

Si certains ont accepté de retirer leur candidature-barrage à l’UPR, nombreux sont ceux qui ont rompu avec le parti. Le recours au vote sanction constitue la grande inconnue de l’équation aux yeux des cadres de l’UPR. De plus, la rhétorique régalienne, de pro face aux « ennemis de l’Etat », n’est pas la voie de la sagesse en période électorale. Aussi étrange que ce discours puisse paraitre, il exprime néanmoins les craintes d’Aziz. L’UPR est à son crépuscule déclinant. L’avenir du parti est plus que jamais menacé d’implosion puisque partout les factions sont sur le pied de guerre. Enfin, l’option  »après moi le déluge » n’est pas à exclure, sachant que le plan d’exécution du scenario à la Poutine n’est pas assuré face aux velléités de la grande muette.

Diakité

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