Le recensement en Mauritanie : L’existence des Noirs mauritaniens en danger

Depuis l’indépendance du pays qui a eu lieu le 28 novembre 1960, les différentes composantes Négro-Mauritaniennes subissent les stigmates d’une discrimination institutionnalisée, dont le but est de les chasser hors du pays pour faire accroire à l’homogénéité ethnique maure en Mauritanie. Face à cette situation, nous ne pouvons que rehausser notre voix aux quatre coins du monde pour la faire entendre. 

Tout est fait pour écarter les Négro-Mauritaniens du corps social de la nation. Des milliers de Noirs-mauritaniens n’arrivent pas à se faire recenser depuis la biométrisation des fichiers de l’état civil, mise en place en mai 2011 par l’ex-président Aziz. Désigné sous une terminologie militaire, « l’enrôlement », le recensement tel qu’il se pratique, a des effets collatéraux qui dépassent l’obstacle administratif. Comme l’a déclaré Human Rights Watch en 2017, il a aussi comme conséquence « d’empêcher des enfants de s’inscrire à l’école ». En outre, le gouvernement actuel a encore durci les opérations « d’enrôlement » pour faire accroire que c’est un processus de sécurisation des données des citoyens.

Ainsi, une vidéo récente parmi tant d’autres, a fait le tour du monde et est maintenant supprimée (censure ?). Celle-ci montrait le témoignage d’une dame d’ethnie peule de la ville de « Kankossa ». D’un âge avancé, elle dénonçait, avec courage, le responsable d’un centre « d’enrôlement » qui traitait les dossiers administratifs selon le faciès des personnes. Plusieurs mois durant, elle s’est présentée tous les jours au guichet mais a été ignorée. Elle a fini par demander pourquoi et a reçu comme réponse un qualificatif déshumanisant de la part du directeur du centre : « il m’a insultée en me qualifiant d’ânesse ».  

Le mal du pays ne se limite pas seulement au problème de l’enrôlement et à ses effets collatéraux. Il s’accompagne du phénomène insupportable et inacceptable des expropriations des terres agricoles dans le sud (vallée du fleuve Sénégal), dont les récents évènements du village de Feralla dans la région du Brakna ne peuvent que raviver nos mémoires sur la continuité des crimes contre l’humanité, perpétrés par le régime militaire mauritanien des années 1989-1991. Ils ont qualifié de « passif humanitaire », les massacres, les viols, la pendaison des 28 militaires et les expropriations des terres qui se sont déroulés lors des opérations d’expulsions, les chiffres allant de 80.000 personnes (journal Libération 1er Octobre 1998) à 200 000 environ. Pire. Ces crimes contre l’humanité, n’ont jamais été condamnés à ce jour. 

C’est pourquoi nous disons que les « évènements » de 1989-1991, qualifiés aujourd’hui, par certains chercheurs et ONG, d’épuration ethnique (le but étant de chasser une partie du corps social hors du pays alors que le génocide vise l’extermination totale d’un groupe), demeure toujours l’ambition tacite des gouvernements successifs du pays. La politique de recensement biométrique et les opérations d’expropriations des terres ont pour but d’écarter les Noirs de la nation mauritanienne. Les mots utilisés, comme celui de l’«enrôlement », ne sont pas anodins. Le pouvoir militaire veut rendre acceptable et flou ce qui se déroule en Mauritanie afin de ménager la communauté internationale et de détourner son attention des visées réelles.

En tant que mouvement pacifique, « Touche pas à ma nationalité section-Belgique », qui milite pour l’égalité des droits civiques en Mauritanie depuis 2011, condamne avec vigueur l’agissement inacceptable de ce directeur en question. Nous exigeons aussi l’arrêt systématique de tous ces rouages mis en marche par l’Etat afin d’empêcher un nombre considérable de Noirs mauritaniens de se faire recenser. Comme le disait Martin Luther King, “Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots”. 

Cette lutte inclusive, pour les droits fondamentaux des citoyens et citoyennes mauritaniens.nes, n’est pas orientée contre une communauté spécifique, mais s’attaque à un système de domination qui favorise une catégorie communautaire Arabo-Berbère au détriment de la majorité Noire.

BA Ibrahima Mamadou, chargé de relations extérieures,

SALL Mohamedou, chargé de communication

BARRY Adama, adjoint chargé de communication.

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