Mauritanie : L’étape d’après ?

Mauritanie : L'étape d'après ? Nayra CIMPERTout porte à croire, que le président Mohamed Ould Abdel Aziz, ne procédera pas à une réforme de la constitution, devant lui permettre de briguer un troisième mandat. Information, qui quand elle se vérifiera à la fin de la mandature, ne nous renseignera pas pour autant sur la nature des événements qui suivront. Car, imaginer, comme on cherche à nous le faire entendre, qu’un système complexe comme le nôtre, où se mêle des intérêts militaires, politiques et financiers, va s’arrêter de fonctionner, juste parce que l’un de ces rouages doit changer, est proprement aberrant.

Il y a certaines réalités, liées à la captation du pouvoir par les militaires, qui ne changeront pas simplement en raison de l’absence de Mohamed Ould Abdel Aziz, à la tête de l’exécutif. Ce serait assez puéril de le croire et d’ailleurs je ne suggère cette hypothèse que pour la forme. Reprendre en chœur, les préoccupations de nos partenaires étrangers, n’est pas un comportement que je qualifierais de sain ou de bien fondé. Leurs intérêts et les nôtres, ne s’évaluent pas sur la même échelle de valeurs. Ils ont besoin de marionnettes serviles, pour les accompagner dans leurs campagnes militaires contre le terrorisme au Sahel. Nous avons besoin de sécuriser nos frontières, de protéger nos populations, de nous rapprocher de nos voisins en vue de coordonner nos stratégies et nos renseignements, pour éliminer durablement la présence des terroristes et autres membres du crime organisé, de notre région.

Notre loyauté, elle va en priorité à nos populations, qui il faut l’admettre sont des victimes en devenir. Non seulement de manière directe, en étant la cible d’attentats aveugles, mais de manière indirecte, en assistant impuissant à la perte de leurs enfants, proies passives ou actives de la propagande terroriste. Cette bataille idéologique et militaire, ne se remportera pas sans la participation effective de nos populations. Elles seules, sont en position d’aider les autorités à débusquer la formation de réseaux terroristes, sur notre territoire.

« Gouverner, c’est prévoir. » disait Émile de Girardin. Suivons son conseil et n’occultons pas les réalités suivantes : Les nouvelles de la cruauté des terroristes, nous sont parvenus de tous les points du globe. Il y a quelques temps, en Tunisie, ils n’ont pas hésité à tuer un petit berger dans les montagnes. Ce simple fait divers, est susceptible de contenir les éléments nous permettant d’anticiper, que les populations nomades, les éleveurs transhumants, correspondent pour les terroristes à une menace. Leur mobilité imprévisible et incontrôlable, sont des données ou des facteurs inconciliables, avec les activités clandestines des terroristes. Nous pouvons choisir d’exploiter cette faille par l’infiltration, en utilisant nos unités méharistes autrement que pour le folklore.

Cette question du terrorisme, les candidats à la future élection présidentielle Mauritanienne, auront à l’assumer. J’avoue que cette perspective me fait froid dans le dos. Il y a tant de ressentiment, entre une frange de l’opposition et le pouvoir militaire, que la tentation sera trop grande pour les premiers de ne pas se débarrasser des derniers, dans une pathétique dynamique de vengeance. Sans compter, que les désistements successifs de cette partie de l’opposition, lors des grandes élections, en signe de boycott soit disant, ont eu pour conséquences, de faire émerger une opposition islamiste et des courants extrémistes identitaires, dans le paysage politique.

Le départ éventuel du président actuel, ne ternira pas son bilan en matière de lutte contre le terrorisme, bien au contraire, il pourra mettre à son crédit le fait indiscutable, que depuis 2011 aucun acte terroriste n’a été déploré dans le pays. Ce prestige, ne sera pas sans rejaillir sur nos forces armées et de sécurités. Leur nécessité ne s’est jamais autant fait sentir, car rien ne différencie nos populations de celles de l’Europe ou des Amériques, quand il s’agit de la conservation de leur vie, de leur propriété, de leur souveraineté et de leur autonomie.

Nos partenaires étrangers, si prompt par ailleurs à nous critiquer en tout, s’accordent sur ce sujet, dans une harmonie époustouflante. En dépit de ce qu’ils peuvent faire miroiter, à nos professionnels de la politique, quand il s’agit de leurs intérêts géopolitiques, ils ne vont pas se perdre dans des considérations sociales, ils vont privilégier le réalisme, le pragmatisme, la fermeté, la force, le contrôle. Tout ce que n’incarne pas, une opposition de circonstance, n’ayant jamais véritablement été aux affaires.

Maintenant, que nous avons passé en revue, les quelques raisons qui m’invitent à penser, que les militaires ne vont pas se soustraire à la gouvernance de ce pays. Je pense qu’il ne reste qu’un pas à faire, pour admettre que par conséquent, le départ ou le maintient du président Ould Abdel Aziz, n’est qu’un sous-événement. Néanmoins, si d’aventure quelques uns d’entre nous, trop jeunes ou trop vieux pour se souvenir, venaient à entretenir cette idée loufoque. Je n’hésiterais pas à revenir pour eux, sur la saga « en dehors du réel », de la transition démocratique de 2005 à 2008.

Ce feuilleton fut l’occasion pour moi, de pouvoir contempler le talent manifeste des membres du comité pour la justice et la démocratie. Ils disposaient d’un savoir faire certain, pour embobiner et rembobiner toute une population, sur le pouce et sous la pression. Leur maestria politique était telle, que nous sommes loin d’avoir été les seuls dindons de cette farce. La première victime, et non des moindres, est quand même l’ex-président Maaouya Ould Sid’ahmed Taya. Qui, au pire des cas, n’a rien vu venir et dans le meilleurs des cas, a laissé faire. Pour ma part, j’ai toujours songé que c’était un choix, que ces derniers avaient dû prendre à contre cœur, ce qui explique le cadeau que peut représenter, la sortie de scène de Ould Taya.

Le contexte de l’époque, n’est pas si éloigné de celui que nous connaissons aujourd’hui, radicalisation de l’opposition, situation sécuritaire précaire, perspectives de dialogues politiques inexistantes. Sans oublier, la situation économique, dont la croissance prévisionnelle affichée, ne semble pas se répercuter sur l’emploi ou sur une amélioration du pouvoir d’achat des foyers. L’accaparement des richesses et la gabegie, ont diminués dans le sens où leur champs d’action et de rayonnement s’est souscrit à un monopole plus restreint. En aucun cas, il n’a été question d’établir la transparence comme principe et référence principale, de la gestion des affaires de l’État. Ou même de rétablir un équilibre, entre le pouvoir militaire et civil, en ce qui concerne le partage de cette gestion.

Louis XI disait : « En politique, il faut donner ce qu’on n’a pas, et promettre ce qu’on ne peut pas donner.» C’est vraisemblablement, la situation dans laquelle nous nous trouverons à la fin de cette mandature. Nous aurons des candidats prêts à donner ce qu’ils n’ont pas et qui nous appartient, et prêts à nous promettre de gérer ce qu’ils ne connaissent pas, mais qui revient pour nous à l’essentiel. C’est un pari trop risqué, pour le faire sur le ton de la plaisanterie. Aussi, je vous en conjure, ne jouons pas le rôle des vautours, en nous demandant : « partira ou partira pas !? » Pour en définitive, nous retrouver comme des appâts, ne sachant pas d’où les prédateurs vont venir.

Nayra CIMPER

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