Lettre à la jeunesse

 quoi songez-vous, mes concitoyens, à quoi songez-vous, « jeunes gens », qui dans les braises de la misère, au nom de la dignité humaine et à la pureté de vos âmes neuves, secouraient les miséreux, les sans-pains et les sans-mots.

Ô diable la raison! Ô diable la raison de leurs âmes souillées par les futilités de notre monde. De l’arrogance absurde à l’ignorance, de l’égoïsme condescendant à l’ivresse du pouvoir, votre silence reflète la bassesse de vos ambitions et votre consentement à la destruction de votre avenir.

Allez-vous défier ce monarque aux tentacules monstrueuses qui vous étouffe, exposer la belle force juvénile qui sommeille en vous et porter sur vos épaules l’espoir de tout un peuple?

Sortirez-vous de votre pitoyable confort, pour la dignité de vos semblables, pour piétiner ce monstre aux allures angéliques, écraser de vos bottes la face de ce fanatisme galopant qui réprime, étouffe et assassine les belles intelligences de notre époque ?

Sortirez-vous manifester, pour le droit de vivre, de penser, de croire et de ne pas croire devant les portes inquisitoires de nos mosquées, devant les visages cyniques de nos dirigeants, sous les fenêtres des fanatiques religieux ?

– Non, non! Vous allez continuer à mendier, à brader votre intégrité, à réprimer vos passions les plus nobles, à étouffer les belles réalisations de votre intelligence, à masser les barbes de ses imposteurs religieux.

Ah, jadis, dans ce désert où les âmes se croisent et se toisent, les libertés individuelles étaient sacrées, la bravoure s’exprimait pour la défense de la dignité humaine et les miséreux, dans la générosité des voisins, vivaient dans la dignité. Heureux étaient ceux-ci, libres étaient nos sœurs, fières étaient nos femmes et digne était la femme.

Je m’adresse aux jeunes hommes et femmes, qui, dans la tourmente, se réfugient dans la facilité, préfèrent se noyer dans ses chaudes larmes que de se manifester, choisissent la misère que de se battre pour sa dignité et acceptent ce bâillon qui se resserre de plus en plus au lieu d’exposer ses idées, sa philosophie, son modèle de société et ses aspirations les plus profondes.

La jeunesse mauritanienne vit dans l’insouciance, dans l’ignorance des enjeux et dans un monde de spectacle. Ils sont les spectateurs de la destruction de leur avenir, les témoins impuissants d’un avenir incertain pour les générations futures et, souvent, des complices de ce qui va ruiner notre pays, faire le lit de sa mort et l’enterrer de leur vivant.

Dans un climat d’insécurité, les élites, biberonnées dans la facilité et le cynisme, se retranchent dans des spéculations politiques dénudées de toute utilité publique et teintées de mépris. La Mauritanie d’en bas, étouffée par des politiques meurtrières, doit se  lever,  se soulever et revendiquer avec détermination une Mauritanie juste, une Mauritanie  fraternelle et une Mauritanie  solidaire.

La Mauritanie d’en bas c’est cette frange de la société mauritanienne qui se noie dans la pauvreté, qui meurt à petit feu en remplissant les poches de nos oligarques. La Mauritanie  d’en bas c’est celle des systèmes D, c’est celle des sans pains, c’est celle des victimes que le système judiciaire traine, maltraite, méprise et ignore.

Le bateau Mauritanie  coule! Le capitaine, têtu et borné n’entend point les craquements des vagues meurtrières qui secouent celui-ci. Il a un cap, une direction et une boussole conçue et tenue par les propriétaires des cargos et les pirates de tout bord. Ce cap se fonde sur la violation systématique de nos lois, un cynisme de plus en plus inquiétant qui met  en avant une vision illusionniste de la Mauritanie.

Cependant, les passagers, habitués à se faire traîner dans la boue doivent  riposter, dénoncer et revendiquer avec force et conviction que le capitaine doit changer  de cap en permettant qu’il y ait des élections libres, transparentes et qui expriment les aspirations profondes de notre peuple.

Ils sont nombreux, plus nombreux que les traîtres aux turbans noirs qui inondent ce bateau, plus nombreux que les truands en costume cravates qui font et qui défont les lois, plus nombreux que les journalistes de la maison de l’UPR qui ne cherchent plus la vérité  et plus nombreux que les milices armées de l’oligarchie financière qui, dans chaque manifestation, fait des victimes de guerre.

Ma foi en la jeunesse mauritanienne est inébranlable, elle est raisonnable et juste. Cette jeunesse est le prophète de notre époque caractérisée par une gestion désastreuse de nos économies, un délaissement de ce qui fonde l’ossature de toute société. L’éducation.

Vous avez une mission jeunes gens. Elle consiste à déconstruire tous les préjugés qui inondent nos habitudes, de réformer radicalement cette mentalité archaïque qui tue de plus en plus, de fonder la base de l’idéal sociétal de vos rêves et d’attraper le train de développement que nous avons raté.

Vous êtes le souffle de cette Mauritanie qui agonise, les maîtres de la destinée mauritanienne et les combattants de sa liberté. Libérez-vous de la paresse, cherchez les différents éléments qui vous lient, trouvez ce qui vous rassemble, chassez ce qui vous divise et sauvez notre pays.

 

KIDE Baba Gallé

Inspiré de «  La Lettre à la jeunesse » de Zola.

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