MEA CULPA «PARLE SI TES MOTS SONT PLUS FORTS QUE LE SILENCE SINON GARDE LE SILENCE»

Étant moins productif sur la politique mauritanienne et silencieux sur mes activités de militant d’une époque, d’un instant, souvent on me pose la question sur les raisons de ce silence. Est-ce un découragement ou un abandon? Ici, je vais tenter de vous livrer ma part de vérité. 

Alors je réponds par cette sublime maxime : «parle quand tes mots sont plus forts que le silence, sinon garde le silence». 

Je suis en retrait pour des raisons personnelles et de convictions. Pour les raisons personnelles ça reste intime, et pour ce qui est de l’ordre de mes convictions, j’ai juste compris beaucoup de choses, à partir de mes propres réflexions et interrogations. 

A la question de savoir, est-ce que le peuple opprimé , victime de l’injustice et des inégalités, en Mauritanie, est-il mature pour la lutte ? je répondrai par un NON retentissant !

A la question de savoir, a-t-on un ou des leaders détachés des liens sociaux, des intérêts personnels en politique, et ayant un but désintéressé, je dirai non également. 

Face a cette réalité, de deux choses l’une: soit on accepte d’être dupe, et de suivre aveuglement la masse dirigée par des leaders qui n’incarnent pas la lutte en soi, de manière désintéressé, pour la cause et rien d’autre; ou soit on ouvre les yeux et on se pose les vraies questions. 

Dans ces deux cas de figure, mon choix est la deuxième voie. Qui est celle introspective, et interrogative. Et ainsi, pour la lutte militante en Mauritanie, on peut décider d’être suicidaire, en se sacrifiant pour un idéal politique commun, tout en n’excluant pas l’éventualité d’être  un héro ou un martyr posthume, en espérant que l’histoire se souviendra de nous, ou au pire disparaître comme un vulgaire ovni. Car le peuple n’a pas encore l’âme d’anoblir ses combattants, ses martyrs.

Suis-je vraiment prêt pour un tel sacrifice, une telle mission Kamikaze?

Partant tout simplement de mon engagement de militant pour la justice et l’égalité, je ne conçois pas la lutte militante àpartir d’un simple papier, en écrivant des articles pour dénoncer tous azimuts; en usant de la plume. Lutter avec la plume en Mauritanie, c’est comme donner des coups d’épée dans l’eau. L’impact d’un changement des mentalité n’en sera pas pour autant renforcé. Ce qu’il faut c’est d’agir autrement,en posant des actes concrets.

En 2014, mon engagement pour la cause des opprimés m’a conduit avec d’autres jeunes mauritaniens, à occuper l’ambassade de notre pays en France. L’objectif était pourtant simple :poser un acte symbolique pour nous faire entendre d’un pouvoir raciste qui, depuis toujours, est resté insensible aux cris des citoyens noirs opprimés. Une action qui fait suite à 4 ans de militantisme syndical à l’université de Nouakchott, au sein du Syndicat National des Étudiants Mauritaniens (SNEM).

Cet acte a eu des conséquentes terribles et déchirantes sur nos vies. Néanmoins, ça  m’a permis de comprendre les réalités du militantisme politique en Mauritanie, et d’ouvrir grandement les yeux.  Je me suis rendu compte d’abord que nous n’avions aucune force organisée et capable de mobiliser des moyens colossaux pour opposer au système un rapport de force qui puisse impulser le changement. Ensuite, l’esprit partisan et la division des mouvements des luttes, provoquent des querelles intestines qui amenuisent et annihilent les forces de lutte. Et par conséquent, nous sommes incapables de soutenir des leaders activistes prêts à tous les sacrifices pour la cause de manière désintéressé et ainsi, ériger la lutte en un principe absolu. En cas de problème, nous ne sommes ni en mesure, ni en capacité de les sauver ou de les maintenir dans une vie décente. La vie de nos héros politiques de jadis  en est une parfaite illustration . Nombreux parmi eux sont morts dans la pauvreté et dans le dénuement le plus total pour un combat qui concernait toutes les victimes du racisme et de l’injustice. Leurs familles biologiques furent les véritables suppliciées  dans cette lutte ingrate. Pour d’autres, ils n’ont constitué qu’un détail dans cette longue lutte sans fond.

Par  des stratégies machiavéliques, on les a couper les vivres et tous les moyens de subsistance pour continuer à vivre librement et mener dignement le combat. 

A mes yeux, seul le mouvement IRA a, dans une certaine mesure, les moyens de sa lutte grâce au réseau assez puissant que s’est constitué son leader.Le grand mal de nos mouvements, c’est l’absence totale de lobbies puissantscapables de les épauler. 

A ma petite échelle de militant indignés, je fus plus de 4 ans bloqué en France, sans aucune possibilité de renouveler mon titre de séjour; ce qui aura pour conséquence l’impossibilité de poursuivre mes recherches doctorales, et d’être libre de voyager comme je voulais. Une conséquence des dommages collatéraux de l’occupation pacifique de l’ambassade. Un sacrifice vain, hélas pour les étudiants que nous étions à l’époque! 

Partant de toutes ces réalités, j’ai décidé de me retirer afin de mieux mûrir et de mieux se préparer pour agir efficacement en prenant  les bonnes décisions. 

Dans la lutte pour la cause des noirs en Mauritanie, soit on décide d’être un martyr posthume sans sépulture ou se taire et agir autrement; se ranger dans le camps du système et faire la politique des hypocrites dans un éternel suivisme. Car malheureusement, en l’état actuel, le peuple mauritanien présente tous les symptômes d’un malade au coma profond, incapable de parler d’une seule et même voix afin d’inquiéter un système qui réunit tous les ingrédients pour imploser de l’intérieur. Ce système va mourir de lui même pour des raisons de pouvoir, de la mégalomanie et de la folie des grandeurs entre les gros caïmans du système. Sans le concours d’une quelconque opposition imaginaire. Une opposition qui s’oppose plus en son sein que contre le pouvoir en place.

Les communautés nègro-mauritaniennes présentent des tares au sein d’elles-mêmes, pour des logiques d’appartenance socio-culturelles qui les minent et les désintègrent politiquement, rendant toute lutte politique caduque et inefficace.

A l’heure actuelle, je ressens plus un besoin intellectuel de déstructuration et de déconstruction des logiques socio-culturelles qui maintiennent nos communautés dans une forme de vie sociale archaïque, inégalitaire et injuste. Déconstruction indispensable pour une lutte politique commune qui ne souffre d’aucune tare, d’aucun esprit sectaire, réfractaire à l’unité dont on a tant besoin pour faire reculer les injustices dont nous sommes victimes, et les inégalités sociales qui s’abattent sur nous, ainsi que le système d’État monstrueux, érigé en règle générale et absolue dans un pays à l’agonie.

Là, est la nécessité que nous devons consentir, comme besoin fondamental de lutte, pour espérer vivre dans une société plus juste et égalitaire; dans un pays uni par des valeurs humainement structurée autour d’un état de droit. 

Un État enfin providentiel pour tous ses enfants!

Abdoulaye Dia

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