Mauritanie La pratique de la Torture, encore routinière

PRESENTATION LALLA AICHA Présidente du CSVVDH

DU RAPPORT ALTERNATIF CONJOINT AU  COMITÉ CONTRE LA TORTURE ET AUTRES PEINES OU TRAITEMENTS CRUELS, INHUMAINS OU DÉGRADANTS DES NATIONS UNIES

Examen du deuxième rapport périodique de la Mauritanie

Session 64 (23 juillet 2018-10 août 2018)

Distingués membres du CAT, chers participants(es)

Résumé :

Ce rapport alternatif,  est le fruit d’un travail  d’enquête sur les allégations de torture, des conditions de détention dans les lieux de privation de liberté, menée par  sept associations mauritaniennes de défense des droits de l’Homme1, avec l’appui d’ACAT

  1. Contexte de la torture en Mauritanie :

2.1. Au plan législatif :

En  2015, des progrès sont enregistrés à travers, La loi n°2015-033. Elle prévoit des mesures de réparation et de protection, ainsi que de nouvelles garanties pour les personnes privées de liberté à l’exception de celles suspectées d’actes de terrorisme ou d’atteinte à la sureté de l’état. Par ailleurs  la mise en application ces dispositions fait souvent défaut surtout  en ce qui concerne la protection et la réparation pour les victimes

     Nous recommandons :

  • Diffuser cette loi et sensibiliser et former les agents de l’État en charge de l’ application  de la loi  .
  • Reformuler l’article 9, de la loi 2015 pour que toute allégation de torture donne lieu à une enquête, prompte et impartiale.
  • La lever les réserves des articles 20-21_22 de la convention contre la torture,

 

2.2. Au plan de l’effectivité des données statistiques :

On note la quasi absence de données sur les plaintes, les enquêtes, les poursuites, les condamnations , et les réparations  relatives à des actes de torture et des mauvais traitements, sur les décès en détention ;  imputés aux  agents des service de sécurité.

En conséquence, il est urgent  de mettre en place un mécanisme indépendant permettant  de générer et traiter des données statistiques, en toute transparence et mettre fin à l’impunité

III. La pratique de la Torture,  encore routinière :

Même si on note un recul  de  la  pratique  de la torture, par rapport aux années 90-91, elle est encore régulièrement utilisée à l’encontre des détenus de droit commun et des personnes arrêtées pour des raisons politiques.

L’usage de la torture se fait au moment de l’arrestation, du transport de la personne arrêtée vers le premier lieu de détention, lors de la garde-à-vue, et lors de transfèrements.

La torture psychologique prend la forme de détention au secret, l’isolement  prolongé des détenus dans des conditions inhumaines, les  privations de sommeil et les menaces de torture.

Nous soulignons que  dans le passé, comme aujourd’hui, les populations noires de Mauritanie sont victimes  de discriminations. Les détenus négro-mauritaniens rencontrés lors des visites de prisons ou d’ex-détenus ont déclaré qu’ils avaient été victimes, lors de leur arrestation ou Pendant leurs détention, de violences et  d’insultes à caractère raciste.(voir sur le rapport détaillé quelques cas documentés de tortures pour illustration)

Par ailleurs, j’attire votre attention, sur le déni du droit à la vérité et à justice  de centaines d’officiers sous officiers et civils d’ethnies noires ; qui  furent torturés lors  d’un génocide raciste en 90-91, et dont les ayants droits ont été empêché par les autorités mauritaniennes de participer a cette session.

  1. Des conditions de détention et de traitements inhumains et dégradants

Les  détenus en Mauritanie, sont autour de 2 000 dont 15% d’étrangers, répartis dans une vingtaine  de prison, la plupart en attente de jugement depuis des années.  La surpopulation carcérale est endémique avec un taux de 253 % qui entraine, l’insuffisance de matelas pour tous les détenus, faible  accès à l’eau, aux soins de santé primaire y compris l’absence de visite médicale à l’entrée, et  l’absence de nourriture suffisante.

  1. De l’Usage excessif de la force par la police et les forces de sécurité

Les forces de sécurité font un usage excessif de la force (coups de pied, de matraque et de ceinturon) pour réprimer les manifestations critiques de l’action gouvernementale ou demandant la libération de prisonniers d’opinion. C’est particulièrement le cas lorsqu’il s’agit de rassemblements de militants et sympathisants de l’IRA-Mauritanie, d’opposants politiques et de jeunes mobilisés pour dénoncer la cherté de la vie ou le droit à la nationalité (Mouvement des jeunes du 25 février, Ne touche pas à ma nationalité).

Conclusion :

En Mauritanie :

Le profil des victimes de torture et de mauvais traitements est assez varié.

  • Les personnes montrant une résistance, même minime,
  • Les ressortissants étrangers, les migrants et les personnes d’origine négro-mauritanienne font régulièrement l’objet de violences de la part des forces de l’ordre, lors des contrôles au faciès, des contrôles d’identité ou lors de vagues d’interpellation dans les quartiers à la recherche des sans-papiers, avec très souvent une volonté d’humiliation.
  • Les personnes arrêtées pour des infractions de droit commun (vol, trafic de drogue)

Les auteurs de mauvais traitements et de torture appartiennent généralement à :

  • la Police nationale et à la gendarmerie. Les officiers de police judiciaire (OPJ), à cause du fait qu’ils sont malformés et peu équipés, et en partie à cause de l’absence de médecine légale dans le pays, ils sont habitués à utiliser la contrainte physique ou morale dans les interrogatoires pour soutirer des aveux et établir la culpabilité d’un suspect ou pour obtenir des informations permettant d’identifier d’autres suspects.

L e plus déplorable est que, les témoignages obtenus sous la contrainte constituent des éléments de preuve utilisés au niveau des tribunaux, même en cas de rétractation des victimes, contrairement aux dispositions légales nationales et internationales.

D’ou l’intérêt  de prise rapide  de mesures efficaces, afin de veiller à ce que toute personne privée de liberté bénéficie de toutes les garanties juridiques fondamentales.

Merci de votre attention

Voici , Pour illustration,  ces quelques cas  de tortures et traitements inhumains et dégradants :

  1. Cas d’obtention d’aveux sous la torture CR11, juin 2016 arrêté à son domicile en juin 2016, durant sa garde-à-vue à la 2ème Compagnie de police à Tevragh Zeina, subi plusieurs séances de torture, de nuit, « Gazrat Bou Ammatou »
  2. Cas de torture d’un jeune négro-mauritanien. YL14, août 2016 arrêté des gendarmes à un barrage routier, bousculé violement dans le véhicule de police, le pantalon baissé devant le public
  3. Cas de torture d’un harratine soupçonné de prédication islamiste. ZB15, juillet 2016 arrêté de nuit, par des agents de la lutte anti-terrorisme, puis transféré dans un lieu de détention non officiel. A plusieurs reprises au cours de sa détention au secret qui a duré deux mois, il a été interrogé sous la torture sur sa prétendue proximité avec des mouvements terroristes étrangers.
  4. Cas de Détention au secret à Nouakchott. MH16, janvier 2016

M.H. a été arrêté à son domicile en janvier 2016 en fin de journée par quatre policiers antiterroristes en tenue civile. Il a été transféré à la Direction de la sécurité en charge de la lutte antiterroriste. Il a été détenu au secret 45 jours dans ce bâtiment sans avoir accès à sa famille.

  1. Cas de : Mohamed Ould Brahim né en 1978 arrêté en juin 2018  par la police antidrogue et décédé sous la torture et dont le corps remis à sa père, dans un état lamentable d’après le père du défunt, et précisant que , c’est suite à une mort naturelle

 

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