l’oubli

Qui n’est pas indifférent face à l’effritement physique et morale des individus illettrés des, cités, ceux qui depuis le temps entrent et sortent dans les demeures des lettrés et des intellectualisés qui ont l’air délivré ? Indifférent face au complexe d’infériorité de celui qui n’a pas connu ou subi l’école étrangère ? Indifférent face à la crasse de leurs tombes, convaincu qu’ils sont destinés à une vie miséreuse et muette. Ils constituent ensemble le décor idéal pour préserver un peu d’authenticité ! Indifférent face aux différentes formes de dépérissement dont tout le monde est témoin. Indifférent face à la prostate du cordonnier qui connaît chaque demeure, chaque dynastie, les secrets des huttes et des chambres …Pourtant ils ont inspirés tant de personnages de romans , tant de prétextes… Devant l’école étrangère, les ancrés et les gens du livre craignaient l’oubli de Dieu l’argument paraissait léger voire irrationnel pour ceux qui voulaient l’univers et construire des maisons qui « résistent au temps » pour reprendre la Grande Royale . L’oubli s’est manifesté de manière violente méticuleusement, particulièrement silencieuse, c’est l’oubli de nous-mêmes, des autres , l’oubli de la compassion , de l’essentiel et même du réel. L’intellectuel de mai 68 et ses prédécesseurs avaient il accompli la tâche urgente celle de pouvoir parler à leurs semblables et à eux mêmes sans paraître d’ailleurs? Parler de tout, construire le langage qu’il faut ? Certains étaient occupés à faire de l’insulte une fierté , à se définir par les mots choisis par le maître, d’autres à se recroqueviller avec talent sur des croyances évidemment non guidées par la raison , d’autres encore à défendre le viol des civilisations : « Un mal nécessaire ». Toute récrimination contre l’intellectualisme est semblable à du populisme, cris souvent crispant certes mais à qui l’on doit prêter oreille car il est profond. Le défi est de pouvoir bâtir le langage adéquat.

Aissata Ahmed. S. Bal « Até »

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