Le virus racial fait plus de dégâts que la Covid-19 dans le commune de Mbagne

Dans le département de Mbagne, la Covid-19 n’a pour l’instant (et nous prions pour que cela reste ainsi) fait aucune victime. À ce stade, la pandémie est visiblement moins dangereuse que les militaires déployés, au bord du fleuve, qui ont déjà enregistré un triste but dans leur compteur avec l’assassinat de Abass Diallo.

Meurtres, arrestations arbitraires, marginalisations, stigmatisations, jusqu’au déni de nationalité ; la liste est longue sur les injustices subies par la population noire dans toute sa globalité, mais surtout celle qui vive au bord du fleuve.
Aucune vie n’est banale (contraire à ceux qui veulent qualifier l’assassinat de Abass Diallo comme étant un « fait banal ») et tout crime mérite d’être condamné, enquêté et les coupables sanctionnés..
Malheureusement, en Mauritanie, c’est la loi du plus fort qui est érigée en règle.Les populations noires, dans leur forte majorité sont victimes de toute sorte d’injustices, et ce depuis les années 1960. Une injustice qui a atteint son paroxysme dans les années de braises… 89/90/91/92… caractérisées par des exactions extrajudiciaires, la déportation massive des populations civiles et des fonctionnaires et entrepreneurs de la communauté noire. C’est aussi la période d’épuration et nettoyage ethnique au sein de l’armée.

Le meurte de Abass Diallo, tué par une patrouille de l’armée, qui surveillait la frontière n’est pas un cas isolé d’injustice. En effet, ce n’est qu’une des multiples manifestations de l’oppression subie par la communauté noire, ce qui apparait comme la simple partie visible de l’iceberg. Nous savons bien que les accidents, incidents et bavures surviennent dans toutes les armées du monde, voire même, au sein des plus professionnelles. Seulement, dans de telle circonstance (bavure, accident..), une enquête est immédiatement et systématiquement ouverte pour faire la lumière afin de situer les responsabilités , rendre justice aux victimes. Et si nécessaire sanctionner les erreurs / et ou fautes professionnelles.
Cependant, dans les pays « normaux », rien ne justifie qu’un militaire tire à bout portant sur un civil désarmé. En principe, l’utilisation d’une arme se fait pour les soldats dans le cadre de leurs services dans deux cas possibles: soit sur ordre de ses supérieurs hiérarchiques ou bien en cas de légitime défense. Dans ce dernier cas, à savoir de la légitime défense, le soldat se retrouve avec sa vie menacée et ne dispose d’aucun autre moyen de se protéger qu’en utilisant son arme. Dans ce cas de figure, on est amené naturellement d’évoquer la proportionnalité des moyens utilisés. Sans oublier tout de même que l’emploi de la force doit également être graduel.

Premièrement, le soldat commence d’abord par avertir verbalement, ensuite armer son fusil, puis faire un coup de sommation afin d’intimider la personne en face et si l’individu n’obtempère point. On peut tirer pour le NEUTRALISER sans pourtant autant viser les zones létales. Généralement, on voit des individus atteints aux jambes par exemple.

Mais dans le cadre du meurtre de Abass Diallo, le tireur aurait visé la poitrine qui est une zone létale. Ce qui est en soi une faute grave. Nous sommes dans un cas de figure où la victime ne possédait aucune arme face à un tireur, a tiré somme toute prémuni d’une l’INTENTION DE TUER. La disparition de Abass nous le prouve.

Bien que l’état-major des forces armées ait présenté l’évènement comme une bavure en dégageant tout ordre donné, au soldat d’ouvrir le feu sur les civils , la gravité seule l’acte entraînant mort d’homme mérite l’ouverture d’une enquête. Au lieu de cela l’état-major non seulement minimise l’incident, mais pire encore, convoque le passé de la victime pour l’inculper post-mortem. Et comme le crime n’est jamais parfait, l’Armée a omis de signaler les forfaits de sa victime. “Malfaiteur récidiviste” dit-elle, cela n’a pas convaincu l’opinion publique nationale des antécédents judiciaires d’Abass Diallo.

Je crois que même s’il fallait tuer un condamné, le minimum serait de lui donner le droit de se défendre lors d’un procès mais pas de l’abattre comme un animal de chasse.
Ce qui est plus triste et révoltant, en même temps dans ces évènements, ce n’est pas seulement le fait d’assassiner un simple citoyen mais la réaction de l’armée et de parti de l’État, l’Union pour la république (UPR), qui au lieu de condamner fermement cet acte «ne serait-ce que pour faire bonne figure aux yeux de ses électeurs sudistes » et de chercher à faire la lumière en diligentant une enquête. Leur objectif fut de jeter du discrédit sur la dépouille encore fraîche de Abass DIALLO. Ils ont préféré s’inscrire dans la ligne de l’armée, entériner la version d’un repris de justice qui mérite de mourir dans les conditions les plus atroces que nous connaissons.
Nous rappelons que la population vivant dans le sud, particulièrement au bord du fleuve, vit depuis très longtemps sous une totale oppression. Quasiment un état de siège officieux. L’ exemple de la localité de M’Bagne où l’ensemble de l’administration locale, gouverneur, préfet, commandant des brigades de gendarmerie, commissaires de police ainsi que les chefs des unités militaires sur place sont commandé par des hommes issus d’une seule et même communauté ethnique (maures blancs) sont –ils plus compétents que les autres collègues noirs ? Connaissent-ils mieux nos réalités locales ? La réponse est sans aucun doute NON. On aurait pu fermer les yeux si ces administrateurs faisaient leur travail dans l’intérêt général de la nation. Mais hélas, c’est tout le contraire qui est constaté sur le terrain.
Pire, ils n’ont que le désarroi en exerçant avec zèle leurs autorités sur les populations marquées par le traumatisme des années de plomb. Les abus et les excès ne sont plus à cacher, il suffit d’y aller pour constater par soi la soumission forcée par le chantage quotidien et d’autres vexations humiliantes. Et malheur à tout celui qui ose lever le petit doigt pour dénoncer une quelconque injustice. Son sort est connu d’avance : d’abord, c’est la torture dans le commissariat et il sera déféré à la prison d’Aleg.
Comme nous le savons tous, le meurtre de Abass DIALLO est survenu seulement quelques jours après l’arrestation arbitraire, d’un groupe de jeune de Wending qui avait « osé » dénoncer le trafic de marchandise et de personnes effectué par les commerçants, avec la complicité des policiers et militaires déployés, dans la commune dans le cadre de la lutte contre la covid19.

Cet acte de bravoure et patriotique de ces jeunes a créé un ressentiment mal digéré parmi certains mieux des autorités.
D’ailleurs, d’aucuns n’avancent que la mort du jeune Abass apparait comme le résultat de cette rancune sonnant comme une vengeance.
Pire encore au moment même où la population locale réclame justice pour le meurtre du jeune Abass, un autre jeune de Wending est toujours à la prison à Aleg accusé à tort (car jusqu’à présent aucune preuve dans cette histoire, son seul malheur est d’avoir son champs à une distance lointaine de l’endroit où est mort l’animal) du meurtre d’un chameau retrouvé depuis plusieurs jours près du village de Wending.

Ce qui n’est pas nouveau, ni étonnant pour les pauvres citoyens qui se résignent devant ces faits, lesquels sont devenus comme étant une vieille tradition.
Les chameliers laissent leurs bétails sans surveillance aucune, s’introduire dans les champs en détruisant leurs champs et jardins. Et généralement leurs réclamations ne trouvent aucune oreille. Puisque dans la plupart des cas, après enquête, on découvre que les cheptels appartiennent à des puissants hauts officiers ou à des hommes d’affaires bien introduits. L’agriculteur n’a dans ce cas que surveiller son champ et les chameaux destructeurs. Tous les ans, le rituel est connu, un chameau mort par accident ou autre c’est tout un village qui se mobilise, bon gré mal gré, pour rembourser. Sinon, au bout de 48 heures, les propriétaires désignent un coupable sans la moindre pauvre qui n’aura que deux options : la réparation ou l’incarcération.
Pour finir, Abass a été tué et l’État ne réagit pas. On aurait dit que sa vie ne compte pas. Durant la même période, un chameau a été retrouvé mort, le coupable a été vite désigné puis embastillé à Aleg.

Pour l’assassinat de Abass DIALLO, les responsables du crime sont connus,mais on ferme les yeux. De ceci, nous déduisons et comprenons que dans la logique de l’État mauritanien, la vie d’un chameau vaut plus que celle d’un individu noir en Mauritanie. L’adage dit :« un homme averti en vaut deux ».

Justicepourabass

Par Ablaaye DIAGNE.

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