Communiqué de OLAN sur la création de l’Institut pour la Promotion et l’Enseignement des Langues Nationales (IPELAN)

Communiqué concernant le projet de décret portant création de l’établissement nommé « Institut pour la Promotion et l’Enseignement des Langues Nationales (IPELAN) »

OLAN a appris par la presse la décision du conseil des ministres, réuni le 21 décembre 2022, portant sur la création d’un institut appelé IPELAN. Cette décision intervient dans le cadre de la loi d’orientation sur l’éducation nationale promulguée le 17 août 2022. Il n’est nul besoin de rappeler le contexte dans lequel cette loi a été votée et le tumulte qui a accompagné sa gestation. Ces évènements sont d’autant plus frais dans les esprits que les nombreux et répétitifs manquements au droit et les violations et violences sous-jacentes sont encore restés sans justice et sans réparation. OLAN continue encore à les dénoncer autant qu’elle continue à rejeter la loi (son article 65 et son annexe notamment) qui prône la suprématie de la langue arabe sur les autres langues du pays et programme méthodiquement leur disparition. En effet, derrière tout jeu biaisé, il est espoir de voir le privilégié triompher sur le lésé, que cela survienne à court, moyen ou long terme. Or, sans même s’étendre à un rappel minutieux du contenu largement exposé de l’article 65 et celui de l’annexe, il s’agit bien de privilégier la langue arabe à laquelle l’on confère toute puissance devant ses concurrentes territoriales auxquelles l’on n’aura alloué que le strict minimum à même de les maintenir dans un statut folklorique en décidant d’emblée de les penser comme inférieures à l’arabe. OLAN s’était dressée contre cette idéologie injuste et infondée, et avait largement sensibilisé sur plusieurs aspects de la question en plus d’avoir organisé des activités de protestation tout au long du processus. L’institut dont il est question ici n’est en aucune manière une nouvelle direction salvatrice que l’État aurait prise. En effet, il figurait déjà comme une étape administrative dans l’annexe du projet de loi. Ainsi, loin d’un revirement ou d’une révision politique, l’institut intervient, comme prévu, en tant qu’instrument nécessaire au déroulement de l’école pensée et soutenue par la loi d’orientation. OLAN insiste sur ce point afin de satisfaire la nécessité d’un rappel pour prémunir contre tout oubli quant à la véritable logique qui sous-tend l’érection d’un tel institut. Il n’est nul besoin de rappeler que cet institut en lui-même n’a aucune valeur que l’on pourrait apprécier ou déprécier, et que sa seule valeur réside dans la mission qui lui est confiée. Or cette mission, c’est d’apprêter les moyens didactiques et la formation des personnels pour le déroulement d’une politique éducative que nous dénonçons en raison de ses visées discriminatoires et de ses principes inégalitaires.

OLAN a eu l’occasion de dénoncer dans plusieurs de ses documents la fermeture du défunt institut des langues nationales, car le contenu et la mission de ce dernier étaient hautement importants quant à la condition de nos langues. Elle se garde de le confondre, comme l’État semble y inviter, avec ce nouvel institut dont le seul rôle est de servir d’un palliatif afin de pouvoir faire passer en douce une mesure d’arabisation totale. D’ailleurs, les termes et délais associés à l’institut en gestation n’ont été précisés ni dans le projet de loi, ni dans ce projet de décret. Les questions essentielles subsistent : Pourquoi réexpérimenter des langues que vingt ans d’expérimentation ont déjà validées ? S’il y a nécessité de réexpérimentation, pourquoi ne pas la faire subir à l’arabe, base d’un système qui va d’échec en échec depuis plus d’une décennie ? Pourquoi cacher les délais ou refuser de les fixer si l’objectif n’est pas d’éterniser ce qui ne devrait être qu’une étape transitoire ? Devant ces questions soulevées depuis des mois, l’État, au lieu d’apporter des corrections, décide de fermer les yeux et de mener son plan comme prévu.

C’est de la même façon que l’État refuse encore d’aborder la question essentielle et fondamentale de l’officialisation des langues nationales, seule capable de servir de socle à tout projet de promotion éducative, culturelle, sociale, politique et économique des langues et, à travers elles, celle de leurs locuteurs et à garantir enfin une égalité de citoyenneté entre tous les mauritaniens. OLAN invite les Mauritaniens et Mauritaniennes, sans aucune distinction, à ne pas perdre de vue cette question fondamentale que des mesurettes sournoisement conçues tentent d’éluder et de repousser vers des horizons inatteignables.

Nouakchott, le 23 décembre 2022

administrator,bbp_keymaster

Leave A Comment

Activer les notifications OK Non merci