Situation à l’UFP par SY Djibril Békaye

Chers camarades,
L’UFP, notre parti en lequel beaucoup de Mauritaniens fondaient un grand espoir, s’est englué depuis 2013 dans une sorte de marais, l’année où ses dirigeants ont pris l’une des décisions les plus absurdes en matière de compétitions électorales, le boycott des municipales et législatives que ne justifiaient ni le bon sens, ni le réalisme politique, encore moins les arguties sur le manque de transparence des élections programmées. Ce qui engendra des divergences profondes au sein du parti, en particulier au niveau du Comité permanent qui, sans que l’on sache les véritables motifs d’une fébrilité toute nouvelle, s’enfonça progressivement dans une crise aux contours aussi flous que troublants, exploitant toutes les occasions, bonnes ou mauvaises, pour creuser sans cesse le fossé de la discorde. Pourquoi ? Question lancinante sans cesse dont, je l’espère, la réponse nous édifiera un jour.


Membre du Comité Permanent du Bureau Exécutif issu du congrès de 2012, acteur sur scène et témoin des différents développements d’une crise savamment nourrie et entretenue pour des causes qui me paraissent encore et toujours étranges, j’ai opté pour une observation attentive et mesurée de la situation, sur une longue période, pour être mieux fixé. Partageant à fond l’essentiel des idées et les points de vue des camarades qui ont décidé momentanément de ne plus se mouvoir au sein d’une instance qui désormais bafoue toutes les règles élémentaires de fonctionnement démocratiques- un choix que je comprenais, en connaissance de cause – au nom d’une majorité mécanique immuable acquise à la faveur de manœuvres et manipulations jusque- là étrangères à nos pratiques du bon vieux temps, j’ai cependant désapprouvé et déploré l’attitude de ces derniers, considérant que c’était là une politique de la chaise vide. J’ai choisi de rester et de continuer à siéger au Comité permanent, après le départ de nos camarades, dans le double but de participer, autant que faire se peut, à tous les débats et d’exprimer librement mon opinion, sachant qu’elle se heurtait à des oreilles de sourds ; et de me déployer auprès des uns et des autres, dans l’espoir de ramener tout le monde à plus de retenue et à de meilleurs sentiments afin de sauver l’unité du parti qui tenait à cœur les militants et sympathisants de l’UFP.


L’une des plus grandes déceptions pour moi a été que le président du parti, au lieu de se mettre au-dessus de la mêlée, s’est plutôt positionné dès le début de la crise comme le chef de file d’une tendance. Il n’a pas fourni l’effort nécessaire et suffisant qu’il fallait, pour éviter de se séparer de camarades, dont l’engagement et le rôle dans la construction et le fonctionnement du parti, dans le prestige acquis au fil du temps, sont connus de tous. Incapable de ce fait de jouer le rôle de rassembleur qui devrait être le sien, il porte à mon avis, et je l’ai toujours affirmé, la plus grande part de responsabilité dans cette douloureuse fracture.
Des camarades de bonne volonté, soucieux du devenir du parti, se sont investis durant des mois, jusqu’au samedi 22 août, à une semaine de la tenue d’un congrès largement controversé. Ils étaient porteurs d’un message et d’une proposition consensuelle, susceptible à leurs yeux de trouver une issue heureuse à l’impasse. Face à l’intransigeance du Président, qui visiblement ne voulait s’engager dans quelque voie que ce soit, en dehors d’un congrès sur mesure, perçu comme un tournant décisif par ses concepteurs mais en réalité destiné à régler leur compte à tous ceux qui refusent de cautionner la nouvelle politique de destruction du parti, force a été de faire le constat de l’échec d’une mission dont l’objectif n’était autre que de rapprocher les points de vue, apaiser les tensions et les passions, créer les conditions propices à l’organisation d’un congrès dans un climat plus serein. Pour l’UFP et pour la Mauritanie.


Mon intention n’est pas ici de relancer un débat désormais dépassé. Le président Mohamed MAOULOUD l’a dit et répété depuis longtemps : « LA CRISE EST DERRIERE NOUS »
Poursuivons. En dépit de ma présence régulière au siège du parti – je suis Secrétaire national à la documentation et aux archives – participant régulièrement et invariablement à toutes les réunions des instances du parti, m’acquittant de mes devoirs de militant à l’occasion de toutes les échéances cruciales où l’UFP s’est investi, j’ai vécu des moments d’isolement, de frustrations et autres provocations, qui justifient quelque part, à l’instar d’autres militants et cadres marginalisés, ma non implication dans une réimplantation et des préparatifs d’un congrès qui, à l’évidence, ne pouvaient me concerner.
Dans sa volonté obstinée d’exclure tous ceux qui sont censés ne pas marquer le pas, y compris les membres élus du BE et du CN issus du dernier Congrès, la direction du parti, par le biais de sa Commission Nationale Préparatoire du Congrès, dans un communiqué en date du 22 août 2020, invite « tous les délégués ainsi que les membres de droit au congrès » à « se présenter auprès de ladite commission munis de leur CNI et de leur CARTE D’ADHERENT OBTENUE SUITE A LA DERNIERE ELECTION ». Façon on ne peut plus claire de concrétiser une décision longtemps caressée par certains membres du CP : BARRER LA ROUTE DU FAMEUX CONGRES à tous les classés indésirables. En prenant une décision qui retire à des membres, sous le fallacieux prétexte de n’avoir pas renouvelé leur adhésion, un DROIT ACQUIS lors d’un congrès, je me demande si, du coup, on ne rend pas caduques, sans s’en rendre compte et avant terme, tous les textes adoptés au même titre lors de ce même congrès. Pour les besoin de la cause, tout semble désormais permis à la direction qui ne s’embarrasse plus de fioritures pour parvenir à ses fins. Mais ni les prestidigitations et autres acrobaties juridiques, ni les tentatives d’intoxication visant à faire avaler la pilule, ne pourraient justifier pareilles incartades.


Nous voilà donc arrivés à un tournant où les chemins semblent irrémédiablement se séparer pour des compagnons de lutte de longue date. Ensemble, contre vents et marées, nous nous sommes engagés corps et âmes depuis notre tendre jeunesse pour la réalisation d’un projet de société que nous croyons viable pour le peuple mauritanien. Le congrès qui s’annonce consacrera définitivement une rupture douloureuse. C’est grave et c’est triste. Ceux qui ont créé cette situation désastreuse, en cela j’accuse la direction actuelle du parti, assument une lourde responsabilité devant l’Histoire, devant les militants et sympathisants de l’UFP et devant le peuple mauritanien.
C’est pourquoi je décide, à partir de cet instant, de me démarquer de la direction actuelle du parti, du point de vue organisationnel et par rapport à sa nouvelle orientation politique de liquidation délibérée de nos acquis arrachés de haute lutte. Je reste disposé à collaborer avec et accompagner toutes celles et tous ceux qui se donnent pour mission de relever la tête et de refuser de courber l’échine face à toute forme de diktat et pour servir les intérêts du peuple multinational de Mauritanie.


A toutes celles et à tous ceux qui, des décennies durant, se sont dressés contre toutes les formes d’injustice, dans un formidable élan de solidarité et de franche camaraderie, souvent au mépris de grands dangers et des privations de toutes sortes, à l’ensemble des camarades qui ont cheminé longtemps ensemble dans la fraternité et l’amour du peuple, pour un noble combat et un grand rêve de voir la Mauritanie débarrassée de toutes les tares, pour l’avènement d’une réelle démocratie dans un pays uni dans l’égalité et la justice, j’adresse mes salutations fraternelles et mes sentiments les meilleurs. Je n’en veux à personne, je regrette seulement de n’avoir pu sauver ce qui pouvait pourtant l’être et à moindres frais.
Qu’ALLAH nous guide sur le droit chemin et fasse qu’un jour ou l’autre tous les patriotes se retrouvent de nouveau pour se donner la main et poursuivre l’œuvre de construction d’une Mauritanie où il fera bon vivre pour tous !

Nouakchott, le 26 août 2020

SY Djibril Békaye
Membre du Comité permanent du Bureau Exécutif de l’UFP
Secrétaire National à la Documentation et aux Archives
Aux membres du Comité Permanent
et du Bureau Exécutif de l’UFP

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