Discours d’ouverture de Tabital Pulaaku International

Mrs les organisateurs, Suudu Baaba

Honorables élus et chefs coutumiers,

Très chers invités,

Chers frères et sœurs participants,

La tenue du Troisième Congrès Mondial du Pulaaku, me donne l’occasion de m’adresser à vous, au nom de Monsieur Elhadj Alpha Amadou Diallo Président de Tabital Pulaaku International qui, en me délégant pour porter sa parole, exprime toute sa gratitude et sa reconnaissance aux immenses efforts que vous déployez pour l’épanouissement du Pulaaku.

Nos travaux se tiennent à un moment charnière, pour ne pas dire crucial pour la communauté fulbe à travers l’Afrique et ailleurs. Notre communauté, entité pont entre les communautés de la sous-région de par son métissage profond, qui réconciliait les frères, facilitait les échanges et transmettait le savoir et la foi sur les longs sentiers de sa transhumance séculaire est aujourd’hui en perdition. Elle semble être mal comprise et mal acceptée dans un espace où elle a été, de tout temps, le pionnier de la paix et le creuset de la sagesse.

Partout, l’intolérance, la violence aveugle et des atteintes multiformes aux codes traditionnels de cohabitation et de solidarité, érigent, de plus en plus, de barrières entre les fulɓe et leurs frères, leurs compatriotes des autres communautés. Dans plusieurs endroits, le pullo est désormais perçu comme ‘’terroriste’’, ‘’jihadiste’’, ‘’intru’’ et ‘’mal intentionné’’. Le plus souvent, il est stigmatisé et banni par les autres, comme s’il était le porteur d’une peste que ces derniers venaient de découvrir, subitement, après tant de siècles de bonne cohabitation, de solidarité exemplaire et d’échanges toujours fructueux qui ont transcendé les temps et marqué, d’un sceau indélébile, le cours de l’histoire africaine.

Le phénomène du terrorisme que l’on met aujourd’hui en avant pour stigmatiser les fulbe, les discriminer, les déporter ou les tuer en toute impunité est, une réalité macabre de notre monde et de notre époque . Le terrorisme ne saurait être associé à une race, à une ethnie, à une tribu ou à un groupe.

La vérité que personne ne semble vouloir intégrer est que dans cette folie meurtrière du jihadisme et du terrorisme, toutes les ethnies de la sous-région soudano-sahélienne, sans exception aucune, comptent parmi elles des égarés et des illuminés jihadistes et des terroristes, pour autant personne ne fait l’amalgame de traiter toutes ces communautés de jihadistes ou de terroristes.

Ce qu’il y a, c’est que les fulbé sont vulnérables de par leur existence à la marge de l’avancée du monde moderne. Ils sont plus vulnérables parce que rétifs aux exigences du monde nouveau. Ils sont vulnérable parce qu’ils sont profondément attachés à leurs valeurs coutumières, culturelles et spirituelles.

Ils sont vulnérables, parce qu’ils aspirent à vivre librement avec honneur et dignité, loin des compromissions qu’exigent les « maîtres à penser des consciences malveillantes» qui se complaisent dans le mensonge et la mauvaise foi, soutenus par certains médias qui font fi de leur déontologie en caricaturant les fulbe, sans distinction, comme ‘’jihadistes’’ et terroristes.

Oui, chers frères et sœurs, les fulɓe sont aujourd’hui assez vulnérables, car ne disposant pas de leviers forts pour amortir le choc du phénomène qui s’est incrusté dans le tissu des sociétés de la sous-région. Plus grave, le chaos induit par le terrorisme accentue les frustrations accumulées, car la communauté fulɓe, de par sa constitution et de par son mode de vie, s’est toujours sentie, au mieux laissée à elle-même dans la plupart de nos Etats.

Aujourd’hui, ce sont ces etats qui les livrent aux criminels en les stigmatisant pour mieux justifier les crimes qu’ils sponsorisent contre eux, au nom de la lutte contre le terrorisme. Et sur ce point, les égarés criminels jihadistes parmi les fulbe  se trouvent être les alliés naturels de ces ‘’systèmes’’ qui font de la fulanophobie une politique d’Etat !

Tabital Pulaaku International a condamné et continuera de condamner tous les actes de violence et de terrorisme dont sont victimes toutes nos populations au Sahel et ailleurs, quels qu’en soient les auteurs. Elle condamne la terreur qu’infligent les ‘’jihadistes’’ et autres criminels aux populations civiles meurtries, dans les villages, sur les routes des marchés ou des pâturages, sur les pistes de transhumance, dans les champs ou encore sur les berges de nos fleuves et de nos ruisseaux.

Tabital Pulaaku n’a cessé d’appeler les Etats à assumer, pleinement, leurs responsabilités à sécuriser, sans discrimination, les populations civiles et de les inviter à contrôler les agissements des éléments des forces de défense et de sécurité dans les zones d’opération afin de s’assurer qu’aucun amalgame, ni stigmatisation ni injustice ou abus ne sont commis contre des communautés particulières et paisibles.

TPI n’a cessé de  rappeler ces états à l’obligation du respect des droits élémentaires les plus essentiels des citoyens et à les préserver. A notre grand regret, dans beaucoup de cas, les forces de défense et de sécurité se comportent de la même manière que les terroristes criminels vis-à-vis de certaines populations civiles.

Tabital Pulaaku est consciente que les défis qui se posent à nos communautés et à nos Etats sont énormes. Il nous revient, à nous, enfants du Pulaaku, dignes fils de l’Afrique, -cette Afrique que nos aïeux ont défendu, servi et pour laquelle ils ont tout donné- de réfléchir, de manière lucide et positive, afin de trouver des solutions efficientes, pratiques et adaptées à ces différents défis. Les problématiques de la sécurité qui déstabilisent nos Etats nous touchent de plein fouet. Elles dérèglent notre mode de vie, accentuent notre précarité, hypothèquent l’avenir de notre existence et détruisent les rapports de confiance entre nos Communautés.

Nous tendons la main à nos frères, à nos compatriotes et aux responsables de nos Etats pour apporter notre contribution à la paix, à la stabilité et au raffermissement de la cohésion sociale dans notre espace.

Il est clair que le mode de vie qui a caractérisé notre communauté est devenu non toléré dans certains pays, il est même combattu dans d’autres sous le label de la lutte contre le terrorisme jihadiste ou autre particularisme . Cette situation est grave, car elle nous conteste le le droit le plus élémentaire à notre diversité culturelle sociale économique et politique.

En cela , c’est le droit à la citoyenneté des populations nomades et transhumantes dans l’espace soudano-sahélien qui est totalement remise en cause. Ici sont interpelés, les Etats, les organisations internationales et l’ensemble des communautés de cet espace, afin que les droits et la liberté de tous soient préservés, garantis et protégés. Nous demandons à l’ensemble des Etats de réguler plus équitablement leurs politiques en matière d’agriculture et d’élevage.

Il est de leur responsabilité de prendre des dispositions législatives et institutionnelles justes, équitables et adaptées pour la gestion des conflits qui naissent de ces activités. Ainsi seulement les états réussiront à atténuer, voire à éradiquer, les nombreux conflits qui naissent de la transhumance, mouvement vital pour le bétail dans une zone où l’écosystème est de plus en plus hostile !

Chers frères et sœurs

Les propositions de solutions et les conclusions auxquelles devraient aboutir vos travaux pourraient servir de feuille de route, aussi bien pour Tabital Pulaaku que pour les Etats et leurs partenaires. Elles seront, peut-être, une principale clé d’entrée pour tous vers des solutions adaptées aux défis de la paix, de la sécurité, de la cohésion sociale et du développement dans notre zone.

Je vous remercie de votre aimable attention.

Diallo Daouda Samba

Vice-président de tabital pulaaku International et

Président de Tabital pulaagu Mauritanie

Paris 25 juillet 2019

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