De la poudre aux yeux sera la réforme et piétiné sera le Peuple

17270378_1357718077584698_1098907751_nS’il est vrai que les pays africains ont besoin de réformes, la Mauritanie a quant à elle besoin d’une révolution économique, sociale et idéologique car il est évident que le système actuel n’offre aucune garantie pour la protection des droits des citoyens et n’apporte aucune amélioration des conditions de vie au quotidien.

En septembre 2016, à l’issue du dialogue qualifié « d’inclusif » avec le peu de partis politiques ayant accepté de dialoguer avec lui, le parti au pouvoir avait annoncé un projet de révision constitutionnel prévoyant notamment la suppression de la chambre haute du Parlement; le changement du drapeau et de l’hymne national ; la suppression de la Haute Cour de Justice, du médiateur de la République et du Haut Conseil islamique.

En ce début du mars 2017, ce projet a été adopté par l’Assemblée Nationale réunie en session extraordinaire. Comme le prévoit la Constitution actuellement en vigueur, ce projet sera la suite soumis au Sénat, (que l’on souhaite supprimer) avant d’être adopté soit par voie référendaire soit par le Parlement réuni en congrès.

  • Des problèmes de légitimé voir de constitutionnalité de la réforme

Si la réforme est adoptée à terme, le Sénat disparaitra et sera remplacé par des conseils régionaux, faisant par la même occasion disparaitre la compétence de cette dernière d’assurer l’intérim à la tête de l’Etat en cas de vacance du pouvoir comme ce fut le cas récemment. On est donc amené à nous interroger sur l’identité du prochain dépositaire de cette compétence d’intérim du pouvoir mais le flou persiste encore autour de cette question pourtant cruciale.

Le transfert de la compétence de la Haute Cour de Justice, concernant les crimes ou trahisons éventuels  du chef de l’Etat ou des ministres, au Conseil Constitutionnel pose un problème de légitimité et un conflit d’intérêt  patent. En effet rappelons que si la justice est réputée être une autorité « indépendante » ou le si sénat est élu au suffrage universel indirect, les membres du conseil constitutionnel et surtout le président de cette institution sont nommés par le Président de la République. Ce conseil constitutionnel se retrouverait donc investi de la mission de juge du pouvoir exécutif  qui l’a nommé.

Il est prévu selon le calendrier de l’adoption de la réforme établit par le pouvoir de confier le texte au sénat pour qu’il se prononce. Seulement  le Sénat mauritanien est aujourd’hui hors mandat car le renouvellement par tiers prévu par le droit mauritanien n’a pas été respecté. D’ailleurs le Conseil constitutionnel avait sommé, en février 2016, le gouvernement à renouveler le sénat dans son entier et non pas par tiers, comme celui-ci souhaitait le faire.

Par ailleurs rappelons que l’engagement pris par le pouvoir, au près des partis de l’opposition qui avaient participé à son simulacre de dialogue (et qui se sont fait dribbler en fin de compte), au moment de la proposition de la réforme, était de faire adopter le texte par voie de consultation populaire, donc l’organisation d’un référendum. Mais le gouvernement, se réfugiant derrière des prétendus raisons économiques, annonce que le projet de réforme va finalement passer par sa chambre d’enregistrement à savoir le parlement.

Ainsi donc pour des questions aussi primordiales on prétend faire de économie, de plus de 5 milliard d’ouguiya nous dit-on, et de mieux utiliser cet argent dans les domaines de l’éducation ou à la santé en sachant que le budget de fonctionnement de l’Etat est voté en début d’année. Donc on veut nous faire crois que malgré la situation catastrophiques des services publics du pays, on a pu voter un budget tellement important que l’état a pu prévoir une somme d’argent aussi conséquente et que cette somme était là en état d’attente qu’un besoin se crée pour être utilisé…

  • De l’utilité de la réforme 

Aujourd’hui les régions, les départements et les mairies se marches sur les plates-bandes au niveau de leur compétence et le pouvoir voudrais encore rajouter un autre niveau de décentralisation ou de déconcentration sans avoir défini à l’avance l’importance des conseils régionaux ni leur place encore moins leur rôle.

Il  y a un risque réel d’alourdissement du fonctionnement des collectivités territoriales qui ont déjà énormément de mal à fonctionner.

Sur les autres propositions comme le changement de drapeau ou de l’hymne nationale, l’Etat a réuni plusieurs élus, des jours durant, pour proposer de nouveaux emblèmes nationaux.  A l’heure où notre monnaie nationale est de plus en plus faible et les denrées alimentaires de premières nécessité de plus en plus chers, impactant ainsi le pouvoir d’achat des populations, où le taux d’emploi dans le pays n’atteint pas 50%, où le SMIC n’atteint pas 40 000 ouguiya, la proposition du gouvernement mauritanien est de changer de drapeau…

Le pouvoir en place comme à l’accoutumé va faire passer sa réforme en force, piétinant une de fois de plus la volonté populaire. En attendant les vrais questions que sont le chômage, les questions de droits humains, celles de notre diplomatie, ne sont pas posées par cette réforme.

Les  vraies réformes ne sont ni superficielles et ni à ce point éloignées des préoccupations réelles des mauritaniens.

Lam Aboubacry                                                                                                                                                          Vice-président du MAPROM 

                                                                                                                                                   

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