Comment « MBS » a tenté de rapprocher Mohamed Ould Ghazouani d’Israël

Pour rester dans les bonnes grâces de l’administration Trump, le pouvoir saoudien tente d’imposer la reconnaissance d’Israël à ses obligés africains, dont la Mauritanie.

Début février, le chef de l’Etat mauritanien Mohamed Ould Ghazouani s’est rendu à Riyad et à Abou Dhabi pour son premier séjour hors d’Afrique afin de s’entretenir avec les dirigeants émirati, Mohamed bin Zayed al-Nahyan dit « MbZ », et saoudien, Mohamed bin Salman dit « MBS ». Si le passage à Abou Dhabi s’est passé sans encombre et a même donné lieu à des promesses d’aides de plus de deux milliards
$, la rencontre avec « MbS » a été beaucoup plus inattendue pour Ghazouani.
Forcing diplomatique


Selon nos informations, lors de l’entretien bilatéral, le prince héritier saoudien a demandé à son invité d’organiser une rencontre avec le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, en vue de reprendre des relations diplomatiques avec l’Etat hébreu. Nouakchott a rompu toute relation avec Tel Aviv en 2009, après une décennie de reconnaissance mutuelle à l’initiative de l’ancien président mauritanien Maaouiya Ould Taya (en exil au Qatar depuis le coup d’Etat de 2005).
Pris au dépourvu, le président mauritanien a répondu à cette sollicitation par une pirouette, soulignant l’importance de se concerter entre pays arabes sur la politique à tenir vis-à-vis d’Israël. Cette réponse diplomatique n’a pas eu l’air de plaire au dirigeant de facto du royaume. La visite n’a d’ailleurs donné lieu à aucune promesse d’aides, alors même que les relations bilatérales sont considérées par les deux parties comme exceptionnelles depuis une décennie.

Le président Mohamed Ould Ghazouani lors de sa visite à Riyad. ©Reuters

Rapprochement Tel Aviv-Riyad
Mohamed bin Salman est devenu l’un des agents les plus efficaces de l’Etat hébreu auprès des pays arabes et africains. Il a très tôt compris combien cette stratégie était la meilleure manière d’entretenir les relations les plus étroites avec l’administration américaine, et principalement le gendre de Donald Trump, Jared Kushner, représentant personnel du président en charge du Moyen-Orient. Kushner a d’ailleurs présenté en 2019 son « deal du siècle » en vue d’obtenir la paix entre Israël
et la Palestine. Ce plan a été accueilli plutôt froidement par les pays arabes. En RDC, l’administration de Félix Tshisekedi a fait le même calcul et a offert, début mars, d’ouvrir une ambassade à Tel Aviv et un poste d’expansion économique à Jérusalem pour bénéficier d’un soutien accru de l’administration Trump (Africa Intelligence du 04/05/20, La Lettre du Continent du 18/03/20).


Humiliations
La visite de Ghazouani en Arabie saoudite était partie du mauvais pied. Mohamed bin Salman a tenu à rendre, en présence de la presse, un vibrant hommage au prédécesseur de son invité entre 2008 et 2019, l’ex-président Mohamed Ould Abdel Aziz. Ce dernier fait l’objet depuis février d’une commission d’enquête parlementaire afin d’auditer ses deux mandats. Ce travail est largement appuyé par Mohamed Ould Ghazouani via le président de la commission, Habib Ould Diah, dont le fils est le médecin personnel du président (Africa Intelligence du 27/04/20). Durant l’ère Aziz, la Mauritanie a collé à toutes les positions saoudiennes à l’international, que ce soit sur la guerre au Yémen, sur l’affaire de l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi à Istanbul en 2018, ou encore sur le Qatar, sous embargo de Riyad et Abou Dhabi depuis 2017.

AIF

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